PROTECTION DES OCÉANS : Un enjeu mondial joué sous la surface
CELEBRATION DE LA 15 AOÛT AU BENIN : L’igname au cœur de la fête identitaire de l’ère culturelle mahi
L’igname, plante à tubercules, occupe une place incontestable dans le paysage agricole béninois. Sa culture remonte à des siècles et a été transmise de génération en génération. Aujourd’hui, elle continue d’occuper une position prépondérante dans la vie rurale et urbaine, tant sur le plan économique, social que culturel.
Cédric Joawo BAKPE
Cette racine, riche en glucides complexes, en fibres, en vitamines et en minéraux, joue un rôle essentiel dans l’alimentation de la population. Sur les marchés du Bénin, l’igname se présente sous différentes variétés, chacune avec son propre goût distinctif et son utilisation culinaire spécifique. Des vendeurs enthousiastes exposent leurs produits ici au marché Guéman à Parakou. Peu de gens s’y intéressent pour le moment, confie Issifath OROU GANKOU, revendeuse d’igname. « Certains disent qu’ils attendent le 15 août à cause de la tradition », dit-elle. Les discussions animées entre les acheteurs et les vendeurs sont rythmées par le marchandage. Selon Amida SEIDOU, revendeuse d’igname, d’autres espèrent voir le prix baisser après le 15 août, en raison de l’abondance prévue sur le marché. En effet, il existe plusieurs variétés d’ignames. Selon une information rapportée par le Journal la Nation, une étude a révélé qu’il existe « 44 variétés populaires d’ignames à chair blanche, à haute valeur nutritive », comme l’a dévoilé le Dr Alban ETCHILA, chercheur au laboratoire de Biotechnologie, ressources génétiques et amélioration des espèces animales et végétales (Biorave). Cependant, à l’approche du mois d’août, la population attend avec impatience l’apparition de la nouvelle variété d’igname appelée ‘’Labôcô’’. Selon certaines revendeuses, elle est déjà disponible dès la fin du mois de juillet jusqu’au début du mois d’août. Cependant, il est crucial de noter qu’elle ne peut être consommée qu’après l’accomplissement de rituels spécifiques. Quels sont ces rituels exactement ?
Une place de choix dans la tradition
Au-delà de son importance gastronomique, l’igname est un pilier culturel. Elle est ancrée dans les célébrations et les rituels de la vie quotidienne. Des fêtes traditionnelles aux événements familiaux, l’igname est présente.
« Lorsque l’igname est récoltée, avant de la consommer, il faut accomplir des cérémonies de sortie de la nouvelle igname. Bien qu’elle ne soit pas vénérée, il a été remarqué que lorsque ces cérémonies ne sont pas effectuées, des problèmes de santé peuvent survenir »,
explique Jean GOUNONGBE, commerçant originaire de Tiyô, dans le département des Collines. En effet, les cérémonies entourant l’igname sont des moments de joie, lors desquels on honore les ancêtres, implore les bénédictions des dieux et exprime la gratitude envers la terre nourricière. Selon le prêtre Fâ Danhouègnon AGNANDJI,
« Le rituel qui accompagne l’igname est similaire à l’anniversaire d’un être humain ».
Tout comme une grossesse dure neuf mois, l’igname passe également neuf mois sous terre avant d’être récoltée. Ainsi, « qu’on soit adepte du vodun ou détenteur d’un oracle (fâ), il est impératif d’accomplir ce rituel avant toute consommation, sous peine de rencontrer divers problèmes », souligne le prêtre Fâ. À cet égard, il précise qu’il n’est pas nécessaire d’attendre le 15 août pour effectuer ce rituel, mais qu’il peut être réalisé plus tôt. Aujourd’hui, le prêtre Fâ Danhouègnon AGNANDJI se réjouit du fait que « de nombreuses personnes comprennent désormais l’importance et l’étendue de ce rituel autour de l’igname avant la consommation ». À cette fin, une série de festivités est organisée à travers le Bénin, notamment à Savalou, dans le département des Collines.
La fête de l’igname : un rassemblement social
Les repas à base de ce tubercule rassemblent familles et amis. La préparation de plats à base d’igname est une occasion de renforcer les liens sociaux, de transmettre des recettes traditionnelles et de perpétuer l’héritage culinaire. Les foyers béninois sont le théâtre de conversations animées, de rires et de souvenirs partagés, tous stimulés par la magie de l’igname. En réalité, l’évolution de la société moderne n’a pas éclipsé la place de l’igname dans la vie des Béninois. Au contraire, elle a engendré de nouvelles opportunités pour mettre en valeur cette richesse culturelle. Des festivals dédiés à l’igname aux plats contemporains revisités, l’igname continue de se réinventer tout en restant solidement ancrée dans les traditions.