Au Bénin, il est important de garantir une meilleure qualité des produits aquacoles manufacturés aux consommateurs. Et si le pays ne dispose pas encore un document normatif dans ce sens, Dr Ir Makosso Allavo, Spécialiste en Sciences et Technologies des Aliments, propose des pistes pour une transformation aquacole de qualité et respectueuse des règles d’hygiène.
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Existe-t-il des normes nationales qui régissent la qualité des produits aquacoles au Bénin ?
Déjà, il faut comprendre que lorsque nous parlons de l’hygiène, la première norme, ou les premières normes les plus accessibles, sont surtout les normes du Codex Alimentarus. Donc, au niveau du Codex, nous avons ce que nous pouvons appeler le paquet d’hygiène, qui retrace un tout petit peu l’essentiel des règles à respecter lorsque l’on décide de faire la transformation agroalimentaire, que ce soit pour des produits agricoles ou des produits aquacoles.
Le Bénin, faisant partie du Codex Alimentarus, utilise également toutes ces normes qui existent au niveau national. C’est vrai qu’on a aussi une norme sur les principes d’hygiène de 2013 qui est utilisée jusqu’aujourd’hui au Bénin. Mais de façon spécifique, nous n’avons pas encore des normes sur les différents produits issus de l’aquaculture.
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Parlez-nous des risques sanitaires associés à une mauvaise hygiène lors de la transformation des produits aquacoles ?
Lorsqu’on décide de faire de l’hygiène, on est obligatoirement bloqué sur le principe des cinq M (Main d’œuvre, Matière première, Milieu, Matériel, Méthode). Lorsque vous êtes dans l’hygiène, vous devez savoir que l’hygiène doit être propre à chaque M. Et déjà, lorsqu’on prend l’opérateur qui est la main d’œuvre, il faut être sûr que l’hygiène corporelle est au point. C’est ça qui fait que dans la plupart des unités, il y a un vestiaire qui est souvent mixte. Vous avez le vestiaire pour les hommes, le vestiaire pour les femmes, pour respecter l’intimité au niveau des deux sexes.
Et pour permettre maintenant à ceux qui viennent travailler de s’échanger et de laisser ce qu’ils ont amené de la maison comme habits et de porter des habits dédiés pour le processus de transformation. Il y a aussi des porteurs asymptomatiques, c’est-à-dire, lorsque vous transformez des produits de pêche et que vous avez une maladie alors que vous ne développez aucun symptôme, lorsque vous allez transmettre ces germes à l’aliment, vous avez la possibilité automatiquement de créer une intoxication.
Car, si ce sont des personnes vulnérables qui n’ont pas une résistance immunologique comme vous l’avez, vous allez carrément les transmettre les germes. Donc, il y a un minimum d’analyse qu’il faut faire au niveau des hôpitaux publics pour avoir une carte sanitaire au cours de ce processus de transformation. Et enfin, je termine sur uniquement la main. Il faut bien laver les mains à chaque fois avant de démarrer et avant de finir. Et dans ce processus de lavage des mains, le lavage des mains respecte un certain nombre de principes. Il faut laver les mains au minimum pendant 60 secondes.
Maintenant, quand on parle de milieu, ce qui est important à respecter est que la table sur laquelle vous devez faire le travail doit pouvoir être lisse. Souvent, c’est un acier inoxydable, mais vous pouvez utiliser d’autres matériaux. Mais le plus important, c’est qu’il faut qu’on ait la possibilité de laver et de désinfecter cette table avant et après.
Pour la matière première, il faut que vous arriviez à identifier réellement ce que vous voulez comme produit. Parce que si vous achetez du poisson ou des crabes qui sont morts, vous ne pouvez pas proposer ce type de protéines à la population. Donc, il faut avoir dès lors un processus de réception et de contrôle de cette matière première avant de lancer votre processus de transformation. En ce qui concerne la méthode. Il est toujours bien d’avoir un processus de transformation qui nous permet obligatoirement de faire un effort pour que ce soit le plus possible standardisé. Vous devez avoir une formule liée à votre processus de transformation pour permettre vraiment au client d’être fidélisé à ce que vous lui proposez.
Par ailleurs, lorsque nous parlons d’hygiène, il y a un élément primordial sans lequel rien n’est possible. C’est l’eau. L’eau potable est le premier élément d’hygiène. Donc, si vous êtes dans un processus de valorisation de nos ressources aquacoles et que vous n’avez pas d’eau, changez carrément d’unité de transformation. Parce que quand vous n’avez pas d’eau, vous êtes obligés de faire de l’hygiène au rabais.
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Quels sont les dangers encourus si toutes ces règles ne sont pas respectées ?
Nous avons trois types de dangers. Le premier est le danger physique. Si je suis en train de manger du poisson et que je retrouve des cheveux ou une bague ou un bois dans ce poisson, ça pose un problème. Là, on parle d’un danger physique parce qu’on peut voir et toucher. Après, on a le danger chimique. Et lorsqu’on parle de danger chimique, c’est lorsqu’on retrouve des produits chimiques dans un produit alimentaire.
On ne peut pas les voir, ni les toucher, mais ils causent des maladies. Donc, si vous voulez acheter du poisson ou des crabes et que vous utilisez un sac d’engrais pour pouvoir transporter le poisson, vous êtes d’accord avec moi que vous avez déjà contaminé le poisson ou les crabes.
Le dernier type de danger, c’est le danger microbiologique parce qu’on a des êtres vivants très petits à l’œil nu avec lesquels nous vivons qui peuvent altérer ou dégrader les produits alimentaires. Donc, lorsque j’ai du poisson qui commence à se dégrader, je suis déjà au cœur d’un danger microbiologique. Donc, le dernier danger, c’est le danger lié aux allergies.
Des fois, on les classe parce qu’il peut arriver que vous soyez allergique à un produit. Mais je le dis toujours, vous ne pouvez pas être allergique ni aux poissons, ni aux crabes, ni aux huîtres. Vous êtes plutôt allergique à un composant chimique ou à une molécule qu’on peut retrouver dans le crabe. Donc, ce qu’il faut rechercher, c’est ce composant-là qui est dans l’aliment et qui ne matche pas avec votre sang. Donc, dire qu’on est allergique au poisson, ce n’est pas vrai.
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Que proposez-vous pour améliorer la transformation des produits aquacoles au Bénin ?
Je pense que lorsqu’on prend le poisson spécifiquement, la première chose à savoir, c’est qu’il faut s’assurer que le poisson qu’on veut transformer est toujours vivant. Tout part de là. Après cela, il est important dans le processus de transformation de prendre des dispositions pour ne pas contaminer le produit.
Il est également important, surtout que nous parlons de tout ce qui est aquaculture, de sensibiliser la population sur les bonnes pratiques environnementales. Parce que si nous contaminons nos eaux, nous aurons des métaux lourds au niveau de ces produits que nous consommons. Et lorsque nous parlons des métaux lourds, nous parlons du plomb, par exemple, qu’on peut retrouver dans du poisson. Donc, lorsque les déchets ne sont pas bien gérés, ils peuvent polluer nos coups d’eau et peuvent avoir des effets très néfastes sur cet écosystème aquatique vivant. Donc, il faut faire très attention pour que déjà notre matière première soit saine d’un point de vue chimique et microbiologique.
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Réalisé par Jean-Baptiste HONTONNOU