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1er groupe de presse agricole en Afrique de l’Ouest

CONSEIL AGRICOLE EN PRODUCTION VEGETALE AU BENIN : Les défis d’un dispositif nécessaire à une large adoption de l’agroécologie

 CONSEIL AGRICOLE EN PRODUCTION VEGETALE AU BENIN : Les défis d’un dispositif nécessaire à une large adoption de l’agroécologie

La croissance de la population suscite aujourd’hui, dans chaque pays, un besoin croissant en alimentation. Face à ce besoin, les producteurs agricoles sont obligés d’intensifier leurs productions avec des produits de synthèse, qui engendrent encore une série de problèmes. L’agroécologie est aujourd’hui apparue comme un levier nécessaire pour relancer la production alimentaire et contrer les risques climatiques. Cependant, elle est considérée comme un changement systémique nécessitant un accompagnement pour une mise en œuvre efficiente. Cela implique l’intervention du Conseil Agricole, qui doit être analysée pour déterminer si elle contribuera à la transition agroécologique en cours au Bénin.

Cédric Joawo BAKPE

Les préoccupations actuelles des exploitants agricoles sont devenues plus précises et diversifiées face aux nombreuses menaces des changements climatiques. Bien que les options proposées par l’agroécologie puissent aider les producteurs à s’en sortir, il est essentiel de les accompagner dans la mise en œuvre en utilisant les outils du conseil agricole. En effet, le conseil agricole permet d’aider les producteurs à identifier eux-mêmes les contraintes qui entravent l’amélioration de la productivité agricole. Il consiste à les former sur l’application des technologies en réponse à leurs préoccupations et à les encourager à adopter les innovations techniques pour améliorer la productivité et la rentabilité de leurs exploitations.

Particulièrement dans le sous-secteur de la production végétale, plusieurs innovations ont été mises en œuvre dans le cadre de la transition agroécologique. Pour ce faire, le Conseil agricole s’appuie sur les Organisations Professionnelles Agricoles, avec une structuration croissante des filières et l’intégration des producteurs et productrices dans ces filières (coton, anacarde, riz, ananas, volaille, etc.).

Prenons l’exemple du Cadre de Concertation des riziculteurs du Bénin, qui met en œuvre le conseil agricole dans la filière riz au Bénin : la mise en œuvre de certaines innovations a été bénéfique pour les producteurs. Un diagnostic des contraintes a été réalisé au départ, suivi de l’identification d’innovations en réponse à ces contraintes, promues autour des Champs Écoles Paysans. L’utilisation du vermis compost comme engrais ou du thé de vermis compost, ainsi que l’urée enrobée à l’huile de neem, ont largement amélioré le rendement dans le système de riziculture intensive. Cela s’inscrit dans la mise en œuvre de la norme SRP par le consortium Rikolto/CCR-B, financé par le programme DEFIA d’Enabel au Bénin.

De même, dans la filière maraîchère, des approches similaires ont été utilisées pour résoudre les problèmes de flétrissement bactérien et de nématodes rencontrés par les producteurs. Ces actions ont été entreprises par la FéNOMA dans le cadre du Projet « Transition agro-écologique par la recherche agricole », mis en œuvre par Enabel et financé par l’Union Européenne. « Il y a 8 CEP qui ont été installés dans le Mono Couffo », précise Romario Agontinglo, technicien de la FéNOMA. En d’autres termes, les CEP sont l’approche parfaite utilisée par le conseil agricole pour promouvoir la transition agroécologique.

L’approche Champ École Paysan (CEP)

Les CEP constituent un outil d’apprentissage privilégiant les échanges autour des démonstrations.

« Ils regroupent 20 à 25 producteurs autour d’une parcelle témoin où l’ancienne pratique des producteurs est mise en œuvre, ainsi qu’une autre parcelle où la nouvelle innovation est testée », explique Locke Tognissoun, Chargé de Programme du CCR B. Cela permet au producteur de constater par lui-même quelle pratique est la plus avantageuse. Pour mettre en œuvre cette approche, un producteur relais est sélectionné par CEP, et il doit ensuite transmettre la formation qu’il reçoit à ses pairs, toujours sous le contrôle du technicien. Cela facilite une large adoption des innovations. De plus, les CEP fournissent un espace d’expérimentation et de vulgarisation agricole pour les acteurs de la recherche. De plus, c’est l’espace idéal où les prestataires privés, qui fournissent le conseil agricole dans les zones agroécologiques, mettent en œuvre leurs innovations. C’est donc un lieu d’échange où le producteur acquiert des connaissances. Cependant, cet outil d’apprentissage facilite-t-il toujours la transition?

Probables contraintes à la progression de l’agroécologie

Pour réussir au mieux la transition agroécologique au Bénin, il est nécessaire d’élaborer une politique à cet effet. Jusqu’à présent, il semble que la notion d’agroécologie soit principalement répandue parmi les partenaires au développement. Une étude intitulée : « Le conseil agricole et l’accompagnement des transitions agroécologiques : une analyse transnationale des dynamiques, des défis et des perspectives dans cinq pays d’Afrique de l’Ouest », menée dans le cadre du projet « Renforcer les services de conseil agricole pour accompagner les transitions agroécologiques de l’agriculture familiale en Afrique sub-saharienne » (ACOTAF), réalisée en novembre 2022 sous la coordination de Christophe Rigourd (Iram) et Patrice Djamen (CIRAD), révèle certaines lacunes du conseil agricole dans cinq pays d’Afrique de l’Ouest, y compris le Bénin. Elle indique notamment qu’au Bénin, « les documents de politique agricole évoquent le développement durable, mais pas l’agroécologie. Cependant, une Stratégie nationale de l’agriculture écologique et biologique est en cours. » C’est une nouvelle encourageante compte tenu de l’importance du sujet. L’étude va plus loin en examinant la manière dont le conseil agricole est opérationnalisé.

« L’étude montre qu’il n’y a pas de différences notables entre les approches de conseil en agriculture conventionnelle et les approches de conseil en agroécologie. Cela pourrait constituer un obstacle majeur à la progression de l’agroécologie. Un autre obstacle majeur est le « sous-financement du conseil agricole ». De plus, il convient d’examiner comment l’approche CEP est utilisée dans le conseil agricole. Elle donne lieu à un espace de vulgarisation agricole, alors que selon l’étude, cela « est peu compatible avec l’agroécologie » qui nécessite la co-création de connaissances (c’est d’ailleurs l’un de ses principes) et valorise les savoirs et savoir-faire des producteurs. Ce principe de co-création est essentiel dans l’agroécologie. La performance des fournisseurs de conseil agricole, le manque d’outils et de méthodes appropriées sont également des domaines sur lesquels il faudra travailler pour garantir une adoption plus large. Il incombe aux gouvernements, aux organisations de la société civile, aux institutions de recherche et aux autres parties prenantes de collaborer davantage pour promouvoir et soutenir activement cette transition agroécologique au Bénin.

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