Un poison discret dans les habitudes de cuisson
Très souvent réutilisée dans les cuisines, l’huile végétale devient un vrai poison quand elle est chauffée plusieurs fois. Cette habitude très courante au Bénin peut provoquer des maladies graves comme le cancer et les problèmes de cœur.
Dans beaucoup de maisons et de restaurants au Bénin, l’huile végétale réutilisée est une réalité quotidienne. Elle est utilisée plusieurs fois pour frire les beignets, le poisson ou encore les frites. Pour de nombreuses personnes, tant que l’huile n’est pas complètement noire, elle peut encore servir. Viviane Bitamane, consommatrice, confirme : « Quand tu utilises l’huile une fois et que ce n’est pas noir, tu peux la réutiliser une deuxième fois. »
Mais cette pratique est très dangereuse pour la santé. L’huile végétale réutilisée, quand elle est chauffée plusieurs fois, change de composition. Elle produit des substances toxiques qui ne sont pas visibles à l’œil nu, mais qui s’attaquent lentement au corps. Dieudonné Codjo, un autre consommateur, explique que plus l’huile est réchauffée, plus elle forme des acides gras qui peuvent déranger le bon fonctionnement du cœur.
La raison principale de cette mauvaise habitude est le coût élevé de l’huile. Le prix du litre d’huile végétale est passé de 700 à 1 100 francs CFA entre 2021 et 2024, selon l’Institut national de la statistique (INSAE). Pour faire des économies, beaucoup préfèrent utiliser la même huile plusieurs fois. Malheureusement, cela revient souvent plus cher à long terme avec les frais de santé.
Selon la nutritionniste Rolise-Audace Gnonlonfoun, l’huile végétale réutilisée produit des substances comme l’acroléine et le 4-Hydroxynonénal (HNE), qui peuvent provoquer le cancer, des maladies chroniques et des problèmes digestifs comme les nausées ou la diarrhée. Elle précise aussi que cette huile, quand elle est mal conservée, s’oxyde et devient encore plus dangereuse.
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Certains consommateurs comme Thiviane Codjia ont compris le danger : « Moi, après la première utilisation, je ne réutilise plus. » Une bonne décision, car une huile trop chauffée perd ses qualités et devient un poison lent. Pour ceux qui doivent absolument réutiliser l’huile, la nutritionniste conseille de ne pas dépasser trois utilisations, de toujours filtrer l’huile pour enlever les résidus, et de la garder dans un endroit propre, sec et frais.
Pour améliorer la situation, plusieurs actions sont possibles. D’abord, informer la population sur les dangers liés à l’huile végétale réutilisée. Ensuite, former les vendeurs de rue et les restaurateurs sur les bonnes pratiques d’utilisation. L’État pourrait aussi mettre en place un système pour récupérer les huiles usées et les transformer, comme cela se fait en Europe. En Allemagne par exemple, plus de 65 % des huiles usées sont recyclées pour faire du carburant, selon l’Agence européenne de l’environnement.
L’huile végétale réutilisée est donc un vrai problème de santé publique. Il vaut mieux l’utiliser avec prudence, car les maladies qu’elle provoque sont graves et parfois difficiles à soigner. Il est urgent d’agir, pour protéger les assiettes et les vies.
Innocent AGBOESSI