PROTECTION DES OCÉANS : Un enjeu mondial joué sous la surface
PRESERVATION DES TOURBIÈRES : L’une des clefs pour contrer la crise climatique
Dans un contexte où la lutte contre le dérèglement climatique est devenue l’une des préoccupations majeures de presque tous les dirigeants du monde, il est désormais plus qu’une évidence de chercher les solutions dans tous les sens. Pour cela, la préservation des tourbières est aperçue comme une super solution parmi tant d’autres.
Jean-Baptiste HONTONNOU
Comme l’on peut le persuader, une tourbière est une zone humide caractérisée par le fait que la synthèse de la matière organique y est plus importante que sa dégradation en raison de la saturation en eau.
La végétation, en mourant, s’accumule progressivement pour former de la tourbe, un sol caractérisé par sa forte teneur en matière organique, peu ou pas décomposée. Composées donc d’énormes richesses naturelles, les tourbières ne couvrent que 3{e43727ebdf1c82cdaf05db1b2e953f1c6b388407dfc0230603c9b856384b4112} de la surface de la Terre, mais ce qui fait d’elles une partie totalement particulière est qu’elles stockent deux fois plus de carbone que toutes les forêts du monde réunies. Pour cela, les tourbières sont prises comme des puits de carbone efficaces, absorbant plus de carbone de l’atmosphère qu’elles n’en rejettent. A titre illustratif, l’on dispose du bassin de Congo, du Brésil et de l’Indonésie qui abritent les plus grandes tourbières du monde. Pour ce qui est du bassin du Congo, sa forêt marécageuse tourbeuse stocke environ 29 milliards de tonnes de carbone selon le PNUE. C’est donc l’équivalent d’environ trois ans d’émissions mondiales de gaz à effet de serre. Dans ces conditions, les tourbières sont ainsi l’un des meilleurs alliés et potentiellement l’une des victoires les plus rapides dans la lutte contre le changement climatique.
En conservant et en restaurant les tourbières, il est possible de réduire les émissions et raviver un puits de carbone naturel essentiel. Cependant, malgré leur importance, les tourbières sont sujets de plusieurs menaces contribuant à sa dégradation et suite à cela, les conséquences sont directes.
Les tourbières menacées par les activités humaines
Nonobstant les multiples avantages liés aux tourbières et l’important rôle qu’elles jouent dans la lutte contre les changements climatiques, ces dernières sont de plus en plus menacées par l’œuvre humaine et sont en train de disparaitre à un rythme alarmant. Environ 15{e43727ebdf1c82cdaf05db1b2e953f1c6b388407dfc0230603c9b856384b4112} des tourbières ont été destinées à l’agriculture, libérant des quantités énormes de carbone et de méthane dans l’atmosphère. De façon plus précises, ces tourbières sont menacées par le drainage pour l’agriculture, la syviculture, l’extraction des ressources, la foresterie commerciale, le développement des infrastructures et, bien sûr, les effets du réchauffement mondial.
Dans un entretien accordé en 2019 sur les incendies des tourbières en Indonésie, Dianna Kopansky, spécialiste des tourbières au Programme des Nations Unies pour l’Environnement, a affirmé que les incendies de forêts et de tourbières sont dus à trois raisons fondamentales : « divers acteurs (entreprises, petits exploitants agricoles) utilisent le feu pour défricher des terres à des fins de développement et d’agriculture ; les incendies sont souvent utilisés pour régler les différents entre grandes entreprises et petits exploitants ; les tourbières drainées sont très inflammables pendant la saison sèche, de sorte que les petits feux de déboisement et de camp peuvent facilement échapper au contrôle ». Et selon ce dernier, la situation n’est pas spécifique à l’Indonésie. Des incendies se produisent dans le monde entier, de l’Arctique à l’Amazonie en passant par le bassin du Congo.
Alors, il est important de reconnaitre que les conséquences de cette destruction sont considérables. Le PNUE estime que les émissions actuelles de gaz à effet de serre provenant de l’assèchement ou de la combustion des tourbières représentent jusqu’à 5{e43727ebdf1c82cdaf05db1b2e953f1c6b388407dfc0230603c9b856384b4112} de toutes les émissions dues à l’activité humaine, soit environ deux millions de tonnes de dioxyde de carbone par an.
Nécessité d’agir
Considérant toutes ces menaces et leurs conséquences, la place doit être faite aux actions concrètes pour restaurer ces puits de carbone que sont les tourbières. Il est urgent de prendre des mesures pour que le carbone enfermé dans les tourbières reste là où il est (humide et dans le sol). Les tourbières drainées doivent également être réhumidifiées pour mettre un terme aux importantes émissions en cours. Les gouvernements doivent agir pour conserver ces puits de carbone. Il faut attribuer une valeur économique aux tourbières et fixer un prix aux émissions de carbone. Cela représenterait un soutien essentiel aux ressources financières des communautés locales et dissuaderait la poursuite de l’extraction nocive des ressources.
Dans ce sens d’agir, il faut reconnaitre également que quelques actions sont faites mais qu’il faut urgemment intensifier pour accélérer la protection, la restauration et la gestion durable de ces tourbières.