Des conséquences sur la consommation
Le prix du piment vert a explosé sur les marchés du Bénin, bouleversant les habitudes des consommateurs. Jadis accessible à toutes les bourses, ce condiment incontournable de la cuisine béninoise est devenu un luxe pour de nombreux ménages. Entre frustration et résignation, vendeuses et clients peinent à s’adapter à cette nouvelle réalité.
Dans les marchés de Cotonou, Porto-Novo, Abomey, Parakou et d’autres villes du pays, la même plainte revient : « Le piment coûte trop cher ! ». Autrefois bon marché, son prix a presque doublé en l’espace de quelques mois. À Dantokpa, le plus grand marché du Bénin, un petit tas de piment vendu à 100 francs CFA coûte désormais 200 francs, voire plus selon la qualité et la taille des piments.
Pour les ménages, cette hausse représente une dépense supplémentaire sur un produit considéré comme indispensable. « Avant, avec 500 francs, j’achetais une quantité suffisante pour la semaine. Aujourd’hui, ce même montant ne me permet même plus de tenir trois jours », se plaint Grâce, une vendeuse de nourriture à Abomey-Calavi. Les restauratrices, grandes consommatrices de piment, sont particulièrement affectées. Certaines envisagent d’augmenter le prix de leurs plats, au risque de perdre des clients. D’autres cherchent des alternatives en réduisant les quantités utilisées ou en mélangeant le piment avec d’autres épices pour maintenir le goût sans trop impacter leur budget.
Une pénurie liée aux conditions climatiques
Les vendeuses de piment vert, principales actrices du commerce de ce produit, attribuent cette flambée des prix à un facteur majeur : le manque de pluie.
Sophie, commerçante à Akassato depuis plus de cinq ans, explique : « Le piment a besoin d’eau pour bien pousser. Cette année, la sécheresse a frappé fort, et les producteurs n’arrivent pas à avoir de bonnes récoltes. Résultat, l’offre a diminué et les prix ont grimpé ». Jeanette, une autre vendeuse, partage le même constat : « Le piment que nous vendons actuellement vient principalement de Malanville, car dans le sud, la plupart des champs ont été asséchés par la sécheresse. Avant, j’achetais une certaine quantité de piment à 10 000 francs, mais aujourd’hui, je dois débourser 45 000 francs pour la même quantité. »
Le changement climatique, avec ses périodes de sécheresse prolongées, impacte fortement l’agriculture béninoise. De nombreux producteurs, qui dépendent des précipitations pour arroser leurs cultures, se retrouvent dans une impasse. Certains tentent d’irriguer leurs champs, mais les coûts élevés de l’installation et de l’entretien des systèmes d’irrigation rendent cette solution difficilement accessible pour la plupart des petits exploitants.
Des solutions à envisager
Face à cette crise, producteurs et commerçants cherchent des solutions pour atténuer l’impact de la hausse des prix. Certains agriculteurs s’organisent en coopératives afin de mutualiser les ressources pour l’irrigation. D’autres tentent de diversifier leurs cultures pour éviter une trop grande dépendance au piment.
Les commerçantes, quant à elles, appellent à une intervention de l’État. « Si le gouvernement soutient les agriculteurs avec des forages et des systèmes d’irrigation, on pourra éviter ces hausses à l’avenir », suggère Sophie.
Des experts en agriculture estiment que le développement de techniques de culture plus résilientes, comme l’utilisation de variétés de piment plus résistantes à la sécheresse ou la mise en place de serres, pourrait être une solution durable.
Des conséquences sur la consommation
En attendant une éventuelle amélioration de la situation, consommateurs et vendeuses subissent les conséquences de cette flambée des prix. Dans les foyers, beaucoup réduisent leur consommation de piment ou le remplacent par des alternatives comme le gingembre, l’ail ou certaines poudres de piment moins coûteuses. « Je suis obligé de mettre moins de piment dans mes sauces, et ce n’est pas pareil. Le goût change », regrette Damien, père de famille à Cotonou.
Pour certains, la situation reste incertaine. Si les précipitations reviennent dans les mois à venir, les récoltes pourraient s’améliorer et les prix baisser. Mais si la sécheresse persiste, la flambée des prix du piment pourrait durer et continuer d’impacter le quotidien des Béninois.
En attendant, les consommateurs doivent s’adapter à cette nouvelle donne, tandis que les vendeuses espèrent une accalmie sur les marchés. Une chose est sûre : au Bénin, le piment, bien plus qu’un simple condiment, est un véritable baromètre des réalités économiques et climatiques du pays.
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Innocent AGBOESSI