Le port de Cotonou, un point de transit stratégique vers le Nigéria
Entre octobre 2025 et janvier 2025, les importations béninoises de riz blanc non-basmati depuis l’Inde ont fait un grand bond. Selon l’Autorité indienne pour le développement des exportations de produits agricoles et alimentaires transformés (APEDA), le pays a importé 753 463 tonnes, un chiffre record qui s’inscrit dans le cadre des étroites relations commerciales qui existe entre le pays et le géant de l’Afrique de l’Ouest, Nigéria.
La réalisation de ces chiffres n’est pas anodine. Il y a bien une raison. Mais bien avant, il faut dire que d’après la firme d’analyse Platts qui a révélé ces données le 17 avril dernier, ce volume représente plus de 6 fois le stock expédié sur la même période, un an plus tôt, par le pays le plus peuplé du monde (119 225 tonnes). Pour les spécialistes, ce bond a été possible grâce à la reprise des exportations de l’Inde et, surtout, la baisse des prix mondiaux.
En effet, l’Inde, acteur incontournable du commerce mondial de riz, a levé ses restrictions sur les exportations de riz blanc non-basmati le 28 septembre 2024. Par la suite, le pays a également supprimé le 23 octobre le prix minimum à l’exportation, qui était auparavant de 490 dollars la tonne. Ce qui a stimulé les commandes des importateurs nigérians qui utilisent le port de Cotonou comme un centre névralgique de son importation.
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Selon les estimations, près de 90 % du riz débarqué au port de Cotonou prend la direction du Nigeria. Un choix stratégique dicté par les écarts de fiscalité entre les deux pays : les droits de douane sur le riz importé s’élèvent à 30 % chez le voisin nigérian, contre seulement 10 % au Bénin, conformément au Tarif extérieur commun (TEC) de la CEDEAO.
Cette différence alimente donc une contrebande florissante dont l’ampleur ne fait plus de doute. En 2024, le Bénin est devenu le premier importateur mondial de riz indien, avec 1,8 million de tonnes importées, surpassant l’Arabie saoudite (1,4 million de tonnes) et la Guinée (1 million de tonnes), selon les données de TradeMap. Un chiffre surprenant lorsqu’on sait que la consommation nationale officielle est estimée à environ 700 000 tonnes, dont près de la moitié est produite localement.
Au-delà du riz, cette dynamique s’étend également à d’autres denrées, notamment la viande de poulet. Depuis l’interdiction des importations de volaille par le Nigeria en 2002, un vaste réseau de contrebande s’est mis en place. Des cargaisons de viande, souvent achetées à bas prix, transitent par Cotonou avant d’être discrètement acheminées par voie terrestre vers les distributeurs nigérians. Si les volumes sont moindres que pour le riz, le phénomène reste significatif.
Jean-Baptiste HONTONNOU