Appelé « l’arbre miracle » par certains en raison de ses vertus exceptionnelles, le moringa est bien plus qu’une simple plante au Bénin. C’est un véritable levier de développement économique et un outil précieux pour la sécurité alimentaire. Seulement, sa structuration en filière reste inactive. Que faire pour transformer ce potentiel en une filière prospère ? C’est à cette question que répond l’agroéconomiste Jonas Dassoundo, en apportant quelques précisions sur les enjeux et les opportunités de la spéculation du moringa dans le pays.
Quelles sont les principales zones de production du moringa au Bénin et quelles sont les particularités agronomiques de sa culture ?
Au Bénin, le moringa est principalement cultivé dans le Nord (communes de Djougou, Natitingou, Parakou, Malanville, Kandi) grâce aux vastes superficies et à la disponibilité de terres sableuses bien drainées. Il est de même cultivé dans le Centre (Tchaourou, Glazoué, Savalou) où il est souvent cultivé en association avec d’autres cultures vivrières ; puis dans certaines zones du Sud (Abomey-Calavi, Allada, Comè…), souvent en jardins de case ou en petites plantations. Le moringa est une plante tolérante à la sécheresse, adaptée aux sols légers à texture sablo-limoneuse et bien drainés, en favorisant une croissance rapide de la récolte des feuilles possibles dès 2 à 3 mois après plantation et une résistante aux maladies majeures, mais sensible à l’excès d’humidité.
À combien pourrait-on estimer les coûts de production moyens par hectare pour le moringa par rapport à d’autres cultures ?
Sur le plan économique, le coût moyen de la production du moringa par hectare en une année, peut atteindre environ 600 000 à 900 000 FCFA/ha la première année (préparation du terrain, semences/plants, main-d’œuvre, irrigation, engrais/compost, entretien). Comparativement au coton et au soja qui nécessitent respectivement environ 250 000 à 400 000 FCFA/ha, 450 000 à 700 000 FCFA/ha et 200 000 à 350 000 FCFA/ha, le moringa est plus coûteux à l’installation, mais son entretien coûte moins cher les années suivantes et sa durée de production (plusieurs années) réduit le coût annuel moyen.
Qui sont les principaux acteurs de la chaîne de valeur du moringa au Bénin ?
Tout d’abord, il faut noter que l’expansion de la spéculation moringa au Bénin implique plusieurs acteurs de la chaîne de valeur, depuis la production jusqu’à la distribution. Les producteurs ou agriculteurs individuels, les groupements de femmes et les coopératives agricoles, sont de la première catégorie de la chaine de valeur. Ensuite viendront les transformateurs (PME et GIE) par la production de la poudre des feuilles du moringa, l’huile de ses graines, des gélules, différents thés, etc. Après, interviennent les distributeurs à travers les boutiques de produits naturels, les supermarchés, les pharmacies, la vente en ligne et ainsi de suite. Enfin vient le tour des consommateurs finaux. Cela prend en compte les ménages, les centres de santé, les exportateurs et les entreprises cosmétiques.
Lire aussi : SPACE 2025 : Le grand rendez-vous de l’élevage bat son plein à Rennes
Quels sont les défis majeurs que rencontre la spéculation moringa au Bénin et quelles opportunités présente-t-elle ?
En parlant tout d’abord de défis, il faut reconnaitre qu’il y a en majorité, le manque de structuration de la filière, malgré l’ampleur que prend sa production dans le pays. En plus de cela, il y a la qualité et les normes d’hygiène qui ne sont toujours pas respectées. Enfin, on peut parler de l’accès limité aux marchés d’exportation faute de certification bio.
Les opportunités quant à elles sont en trois volets également. Il y a en effet la demande croissante pour les super-aliments en premier, la forte valeur ajoutée du Potentiel de transformation locale en deuxième position et enfin la possibilité d’intégrer la culture dans les programmes nutritionnels et scolaires.
Quel potentiel détient le moringa pour l’amélioration des revenus et création d’emplois ?
Le moringa, par sa productivité élevée et sa diversité de produits (feuilles, graines, huile, poudre), offre aux producteurs un revenu stable toute l’année. Une exploitation bien gérée peut ainsi générer 1,5 à 3 millions FCFA/ha/an après la première année. La filière crée aussi des emplois dans la transformation, le conditionnement, la distribution et la commercialisation.
Quel impact aura la promotion de cette spéculation sur l’économie béninoise ?
Les impacts sont nombreux, mais je vais énumérer quelques-uns. On peut évoquer la contribution potentielle au PIB agricole par l’exportation de produits transformés, la réduction des importations de compléments alimentaires et la dynamisation des PME rurales et valorisation des savoir-faire locaux.
Comment la spéculation moringa peut-elle contribuer à la sécurité alimentaire et à la diversification agricole au Bénin ?
La sécurité alimentaire dans une nation est très capitale pour le bien-être de tous. Ainsi, quand on prend le moringa, c’est une culture très riche en apports nutritionnels (protéines, vitamines, minéraux) pour les ménages. D’autre part, il peut permettre la réduction de la dépendance à quelques cultures de rente comme le coton et la possibilité d’une intégration dans les systèmes agroforestiers et jardins vivriers.
Selon vous, quelles sont les perspectives pour la filière moringa au Bénin et quels sont les principaux défis à relever pour en faire un secteur durable et prospère ?
En termes de perspectives, je pourrais parler d’une structuration en interprofession de la filière, de la certification bio, de l’intégration dans les politiques de nutrition et d’agro-industrie, puis le développement des exportations.
Quant aux défis à relever pour faire de la filière moringa un secteur durable et prospère, on peut citer l’accès au financement, le respect des normes de qualité, l’organisation de la production à grande échelle et la lutte contre la concurrence de produits importés non conformes.
Réalisé par Madeleine Mahouklo ATODJINOU


