L’afitin, une moutarde qui souvent renchérit les mets béninois, est un produit artisanal clé dans les marchés du Sud du Bénin. Transmis de génération en génération, ce savoir-faire traditionnel est crucial pour l’économie des ménagères.
Innocent AGBOESSI (stag)
Afitin, une moutarde fermentée issue de graines de néré, est un produit artisanal qui nécessite un savoir-faire particulier. « Cela fait plus de vingt ans que je fabrique et vends de l’afitin » raconte Savadji jeanne, une vendeuse et productrice expérimentée du marché de Akassato. « C’est une tradition que j’ai apprise de ma mère et que j’enseigne maintenant à ma fille ».
La préparation de l’afitin est un processus long et minutieux qui comprend la fermentation des graines, leur broyage, puis leur assaisonnement. Savadji Jeanne explique qu’il faut plusieurs étapes pour obtenir la moutarde à base de Néré. « Lorsque vous avez les graines brutes, vous les faites d’abord cuire au feu, puis vous attendez qu’elles soient cuites. Le lendemain, vous écrasez ces graines cuites. Vous les tamisez ensuite pour séparer les parties fines des déchets, puis vous les rincez en les trempant dans plusieurs eaux propres. Après cela, vous mouillez du sable et le versez dans le récipient contenant les graines rincées, que vous remuez. Cela permet aux graines les plus denses de remonter à la surface, tandis que les déchets restent au fond. Vous récupérez progressivement ces graines essentielles, que vous rincez à nouveau. Vous les remettez alors au feu pour les laisser cuire à nouveau, puis vous les laissez en fermentation jusqu’au lendemain. Le lendemain, vers midi ou 15 heures, vous ouvrez le récipient, laissez les graines refroidir complètement, ajoutez du sel et les écrasez une dernière fois. Enfin, vous attendez que le mélange soit complètement refroidi avant de le mettre en panier pour la vente », a-t-elle détaillé
Cependant, la vente de l’afitin, bien qu’étant rentable, n’est pas sans défis. Les fluctuations des prix des matières premières, les conditions de conservation et la concurrence croissante posent des problèmes aux vendeuses. « Il y a des jours où nous avons du mal à obtenir des graines de qualité, » se plaint Olaogoun Hanriette, une productrice d’Afitin. « Mais nous nous adaptons et continuons à fournir le meilleur produit possible à nos clients », a-t-elle rassuré
Les prix varient en fonction de la qualité et de la présentation du produit. Afédjou Pauline,vendeuse de Afitin expérimentée du marché de Glo-Djigbé, témoigne : « en une semaine, je peux vendre jusqu’à 3 paniers de afitin, ce qui me rapporte environ 50 000 francs CFA. C’est une source de revenus indispensable pour ma famille ». Il faut noter que la rentabilité dépend de la région. « Quand j’étais à Natitingou, je ne vendais pas autant car les habitants du Nord le consomment peu », rajoute Afédjou Pauline.
Le marché de l’afitin au Bénin est un exemple vibrant de la manière dont les traditions peuvent s’adapter aux réalités modernes, tout en offrant des opportunités économiques significatives. Malgré les défis, les vendeuses d’afitin, de toutes générations, continuent de perpétuer cette tradition avec fierté et détermination. Cependant, pour que cette industrie prospère véritablement, il est crucial de trouver un équilibre entre tradition et modernité, en assurant la protection et la valorisation de celles qui la font vivre.