USAGE DE « SIDAKIN » POUR ASSAINIR L’EAU CONTAMINÉE : Une solution peu efficace
RÉINTRODUCTION A L’HÉMICYCLE DU DÉBAT SUR L’ADHÉSION DU BÉNIN À L’UPOV : PNOPPA, FAEB, SYNERGIE PAYSANNE…, la grogne totale !
Ce jeudi 24 octobre 2024, le Président de l’Assemblée Nationale du Bénin, Louis Vlavonou, a officiellement ouvert la deuxième session ordinaire de l’année 2024. Parmi les points inscrits à l’ordre du jour, y figure « la protection des ressources agricoles via l’adhésion à l’union internationale pour la protection des obtentions végétales (UPOV) afin de valoriser l’agriculture béninoise sur la scène internationale ». Une nouvelle qui semble ne pas être du goût une fois de plus des leaders de la société civile et des organisations paysannes.
Jean-Baptiste HONTONNOU
2017 : l’année où tout a commencé. 07 ans déjà que cette probable adhésion du Bénin à l’UPOV frôlait les lèvres. Et si les débats n’ont pas pu aboutir à l’hémicycle, les organisations paysannes en ont pour quelque chose. A travers une forte mobilisation, des plaidoyers et surtout des lobbyings, ces organisations ont réussi « à déjouer le plan » auparavant. Ce qui n’a pas été suffisant pour ravaler cette envie.
L’UPOV en bref
Somme toute, l’Union pour la Protection des Obtentions Végétales est une organisation intergouvernementale établie par la Convention internationale pour la Protection des Obtentions Végétales adoptée à Paris en 1961 et révisée en 1972, 1978 et 1991. Sa mission est de mettre en place et promouvoir un système efficace de protection des variétés végétales afin d’encourager l’obtention de variétés dans l’intérêt de tous.
Dans un contexte où l’agriculture est essentiellement traditionnelle ou familiale en Afrique, et plus de 90 % des semences sont accessibles par le biais des systèmes propres aux agriculteurs, notamment les stocks des agriculteurs, les réseaux sociaux et les marchés locaux, il est important de privilégier « les droits des agriculteurs à conserver, replanter et partager librement leurs semences ». Mais, selon l’AFSA (Alliance for Food Sovereignty in Africa), « le système UPOV 1991 contredit ces droits en traitant des droits de l’obtenteur (individuels) et non des droits de l’agriculteur (collectifs/communautaires) ». Sinon en réalité, les droits d’obtenteur accordent une exclusivité minimale de 20 ans. Plus précisément, l’article 14 de la convention précise que « les actes relatifs au matériel de reproduction ou de multiplication de la variété protégée sont soumis à l’autorisation de l’obtenteur ».
Ces droits sont également protégés par l’article 18, qui précise que « le droit d’obtenteur est indépendant de toute mesure prise par une Partie contractante pour réglementer sur son territoire ». Ainsi, un Etat membre de la Convention ne peut pas modifier cette exclusivité. L’autre fait marquant est que le commerce, l’échange, le partage et le don de semences de variétés végétales protégées restent toujours interdits.
Il convient de rappeler que pour qu’une variété de semence soit commercialisée, elle doit être enregistrée dans un catalogue créé par l’autorité désignée de chaque État membre, conformément aux directives de l’UPOV. L’enregistrement s’effectue selon les «critères DHS» (distinction, homogénéité et stabilité). Cela signifie que la variété doit être distincte, homogène et stable, tout en satisfaisant au critère de nouveauté.
Face à tout cela, le groupe de travail sur les semences de l’AFSA s’insurge contre les régimes restrictifs du commerce des semences tels que l’UPOV, et « est largement engagé dans la résistance à la mainmise des entreprises sur les systèmes semenciers et alimentaires africains, tout en renforçant la riche diversité des systèmes semenciers paysans ». Mais, il n’est pas le seul. Au Bénin, cette volonté d’adhérer à l’UPOV n’est pas du goût des OP.
« Une menace qui refait surface »
D’abord, à l’annonce de ce point à l’ordre du jour de la deuxième session ordinaire de 2024 de l’Assemblée Nationale du Bénin, les voix se sont levées comme depuis 2017. Dans une lettre conjointement signée par la FAEB (Fédération Agro-écologique du Bénin); JINUKUN-COPAGEN; COPAGEN; SYNERGIE PAYSANNE; CONVERGENCE TERRE EAU; FORUM BIODIVERSITÉ DU BÉNIN(…) et envoyée au Président Louis Vlavonou, il est clairement mentionnée qu’il s’agit d’un « menace qui refait surface ». Plusieurs interrogations donc : « Pourquoi malgré toutes les actions citoyennes pacifiques depuis 2027, vous tenez à poser des actes non favorables à la quiétude, à la paix, à la justice sociale, au bien-être des populations, des paysannes dont les conditions de vie et de travail peinent toujours à être améliorées ? Que faut-il faire encore d’autre pour que nos décideurs comprennent enfin que L’UPOV n’est pas du tout un dispositif pour valoriser l’agriculture béninoise, africaine, mais plutôt pour la plomber ? »
Par-dessus tout, « l’UPOV est un instrument très dangereux d’exclusion, de monopole, du néocolonialisme, du neoesclavagisme, du système capitaliste, de prise en otage de nos systèmes semenciers paysans », peut-on lire dans cette lettre.
Mieux, selon Arouna Lawani, Président de la Plateforme Nationale des Organisation Paysannes et de Producteurs Agricoles du Bénin (PNOPPA), « on ne peut pas être tributaire des semences venues d’ailleurs. C’est une autre forme de colonisation et d’esclavage ». Et pour ça, les politiques devraient comprendre et mettre un trait sur cette démarche. Mais, malheureusement, « ils ne voient pas la question de la même manière ». L’eau sera apportée à son moulin quand Léopold Lokossou, Députée de la 9è législature et leader de la lutte paysanne, va affirmer qu’« adhérer à l’UPOV, c’est comme dépendre de la semence extérieure ».
Que faut-il faire ?
S’ils refusent qu’il s’agirait d’une lutte perdue d’avance, les leaders paysans préconisent qu’il est important de se battre jusqu’au dernier souffle. « Au niveau de la FAEB, nous nous préparons pour reprendre notre bâton de pèlerin », a martelé Pierre Bédié, Président de la FAEB. Pour lui, il faut que « le gouvernement comprenne qu’on n’a pas besoin d’adhérer forcément à l’UPOV ».
Dans la même logique, le Président Lawani pense qu’il est important « de continuer à faire le plaidoyer et le lobbying mais nous ne sommes pas à l’Assemblée Nationale pour faire les lois ». Cependant, une chose est sûre. « Parmi les députés, il y a des gens éclairés qui voient les conséquences de cette adhésion »
C’est fort de cela que le député Léopold Lokossou, en tant qu’agriculteur, envisage de « mettre la bouchée double ». « L’État a ses arguments et nous aussi allons présenter les nôtres », peut-il affirmer. Vivement que cette fois-ci la lutte paye pour une fois de bon.